Chapitre de Kadidiatou Kadio paru en novembre 2013 dans l’ouvrage Santé maternelle et accès aux soins en Afrique de l’Ouest, publié aux éditions L’Harmattan, Paris (Pierre Fournier, Slim Haddad, Valéry Ridde, avec la collaboration d’Anne-Marie Turcotte-Tremblay et de Michel O’Neill).
Résumé du chapitre:
Depuis 2007 est mise en œuvre dans le district sanitaire d’Ouargaye, au Burkina Faso, une recherche action sur l’accès aux soins des indigents afin de mettre au point des stratégies de ciblage des plus pauvres, pour les protéger contre l’exclusion des services de santé engendrée par l’obligation du paiement direct des soins depuis 1987. Une évaluation de la pauvreté selon une mesure économique a prouvé la capacité à identifier les indigents. Cependant, paradoxalement, 410 des 2 330 indigents repérés en 2010 (17,6 %) étaient issus de ménages du quintile supérieur de pauvreté, majoritairement des personnes âgées qui n’étaient plus en mesure de travailler et qui profitaient de la solidarité familiale sous plusieurs formes : repas quotidiens, vêtements, labour de champs, respect. Afin de comprendre leurs perceptions de l’indigence et de la solidarité, la technique du récit de vie a permis de recueillir des données auprès de 54 indigents issus de ces ménages. Nous souhaitons ainsi contribuer à produire des données qui enrichiront les débats autour de la problématique du ciblage, puisque les aspects liés aux valeurs et aux préférences des communautés dans les expériences de ciblage restent encore peu étudiés (Coady, Grosh et Hoddinott, 2004). La méthode de l’analyse thématique (Paillé et Mucchielli, 2003) a guidé l’analyse des données. Pour certains, l’indigent est dans l’incapacité de subvenir tout seul à ses besoins et vit grâce à la solidarité de l’entourage. Ici, la solidarité sociale (ressource exogène) n’exclut pas l’indigence. Par contre, d’autres estiment que celui qui dispose d’un soutien contribuant à ses dépenses de consommation n’est pas indigent. Dans ce cas, l’indigence est l’absence de ressources endogènes et exogènes. L’entraide ou la solidarité sont perçues quant à elles comme une assistance matérielle, financière ou morale apportée à une personne en difficulté permanente ou temporaire, qui se présente sous forme de dons et de contre-dons. Le recours ou le droit à l’assistance varient selon la fonctionnalité du réseau social et selon le principe de réciprocité (Vuarin, 1994). Conscientes de cela, et par respect des normes sociales, les personnes pauvres se retiendraient ainsi de solliciter l’aide des autres. Ce principe dans les relations de solidarité sociale contribuerait à isoler ceux qui sont incapables de l’observer (Kenkou, 1994). Néanmoins, les indigents des ménages aisés se reconnaissent comme mieux nantis que certaines personnes qui sont sans soutien, et affirment que l’assistance devrait être au profit de celles qui en ont le plus besoin.
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