Le revenu minier et l’accès aux soins en Afrique: les recettes tirées de secteurs miniers bien gérés ne pourraient-elles pas financer l’exemption du paiement pour l’accès aux soins de santé?

Cet article publié le 12 août 2015 dans Development in Practice et rédigé par Valéry Ridde, Bonnie Campbell et Andréanne Martel porte sur le revenu minier et l’accès aux soins en Afrique et plus particulièrement sur une réflexion sur le financement de l’exemption du paiement pour l’accès aux soins de santé par les recettes tirées des secteurs miniers.   (suite…)

L’autopsie sociale pour étudier les déterminants sociaux des accidents de la circulation à Ouagadougou, Burkina Faso : étude pilote

Présentation d’Amandine Fillol, de l’Institut de Recherche en Santé Publique Université de Montréal (IRSPUM), réalisée en collaboration avec E. Bonnet, J. Bassolé et V. Ridde pour le Colloque “Santé et Société” de Toulouse, présentée le 13 mai lors de la session “Déterminants sociaux”, sur l’étude des déterminants sociaux des accidents de la circulation à Ouagadougou.

Évaluer les inégalités territoriales de l’exemption des paiements sur le recours aux soins au Burkina Faso

Présentation d’Emmanuel Bonnet de l’Institut de Recherche pour le Développement à Ouagadougou, réalisée en collaboration avec David Zombré et Valéry Ridde pour le Colloque “Santé et Société” de Toulouse, présentée le 13 mai lors de la session “Inégalités sociales et système de soins”, sur l’évaluation des inégalités territoriales de l’exemption des paiements sur le recours aux soins.

Revue des politiques d’exemption/subvention du paiement au Burkina Faso: la stratégie de subvention des soins obstétricaux et néonataux d’urgence

grand_unicefÉtude réalisée par Valéry Ridde et Abel Bicaba sur le paiement direct dans le secteur de la santé, commanditée par l’UNICEF et coordonnée par l’Institut de Médecine Tropicale d’Anvers, Belgique (Bruno Meessen) – article complet à télécharger en bas de page.

Résumé:

En Afrique, la part des dépenses de santé supportée directement par les ménages est très importante, souvent largement au-dessus des 50%. L’une des raisons à cette situation est que la modalité de financement des systèmes de santé la plus souvent choisie a été le paiement direct. Les usagers doivent payer lorsqu’ils consultent et tout le monde s’accorde aujourd’hui pour affirmer que cette modalité de financement constitue une des barrières financières à l’accès aux soins. Aussi, de plus en plus de pays africains décident-ils, ou envisagent-ils, de supprimer le paiement direct. Face à ces expériences très nouvelles la plupart du temps, l’UNICEF a décidé de commander une série d’études dans plusieurs pays africains afin de disposer de quelques données pour mieux conseiller les gouvernements qui décideraient de s’engager dans cette voie. Compte tenu de l’état d’avancement de ces politiques publiques en Afrique, des besoins en connaissances et des ressources imparties à ces études, il s’agit essentiellement de documenter les processus de formulation et de mise en oeuvre. Le présent rapport concerne le Burkina Faso et notamment, l’analyse de la stratégie nationale de subvention des soins obstétricaux et néonataux d’urgence. L’étude a été réalisée en novembre 2008 au moyen d’un cadre d’analyse de l’étude des politiques publiques. Des données qualitatives et quantitatives ont été utilisées. Des entrevues individuelles et de groupes ont été réalisées auprès de 76 personnes. Des visites de terrain ont été réalisées dans un district urbain et dans un district rural. Les résultats présentés dans ce rapport ont été discutés par des personnes ressources connaissant bien le Burkina Faso ainsi que lors d’un atelier d’analyse transversale à propos de tous les pays concernés par l’étude en la présence des chercheurs. Le paiement direct des soins de santé existe au Burkina Faso depuis les années 1980. La généralisation de l’Initiative de Bamako en 1993 puis celle de la tarification des actes quelques années après fait en sorte que les usagers qui le peuvent ont l’habitude de payer les soins. Les systèmes d’exemption du paiement pour les indigents n’ont jamais véritablement fonctionnés. Plusieurs décisions ont été prises dans les années 2000 pour réduire ou supprimer le paiement des soins pour certaines catégories de personnes. Des systèmes ont été testés dans quelques districts pour réduire les coûts des césariennes. Dès 2004, un comité s’est réuni pour formuler une politique nationale visant à améliorer l’accès aux soins obstétricaux en vue de réduire la mortalité maternelle. Il s’agit de la stratégie nationale de subvention des soins obstétricaux et néonataux d’urgence (SONU) adoptée en conseil des ministres en avril 2006. Le prix des césariennes (octobre 2006) et des accouchements (janvier 2007) devient subventionné à hauteur de 80% ou 60% selon les formations sanitaires, les femmes devant payer les 20% ou 40% restant (par exemple 900 F CFA pour un accouchement eutocique dans une maternité dont le coût est estimé à 4.500 F). Le prix du transport des centres de santé aux hôpitaux pour les césariennes sont compris dans cette subvention. La formulation de cette politique a bénéficié du soutien technique de la Banque Mondiale (à l’occasion du cadre stratégique de lutte contre la pauvreté), de cliniciens nationaux et d’experts plusieurs agences internationales. Les coûts des césariennes ont été calculés sur la base des coûts de certaines expériences et celui des accouchements sur la nomenclature nationale du coûts des actes. 17% de l’ensemble de la subvention sont prévus pour les indigentes qui ne doivent ainsi pas payer le reliquat des 20%. Plusieurs options ont été étudiées pour la subvention (60%, 80% et 100%). La suppression totale du paiement n’a pas été retenue car l’écart d’effets hypothétiques sur la mortalité maternelle n’était pas jugé suffisamment important par rapport aux deux autres options, et l’État ne semblait pas disposer d’assez de ressources. Il est donc prévu de consacrer près de 30 milliards de F CFA pour la période 2006-2015 dont 5 milliards pour les indigents. L’ensemble du financement provient du budget de l’État (y compris l’aide budgétaire). Sur la base des accouchements et césariennes attendus, chaque formation sanitaire du pays a reçu une somme d’argent sur la base des coûts forfaitaires des actes. La politique a démarré immédiatement dans tous les districts du pays alors même que tous les instruments techniques n’étaient pas complètement prêts. Le budget voté concerne le paiement des actes mais aucun budget n’a été voté pour le plan de mise en oeuvre et le plan de communication. Il subsiste un écart de 25% en moyenne pour la période 2006-2008 entre le budget prévu dans la stratégie et celui inscrit dans le budget national. S’il y a eu de nombreuses réunions d’informations, elles n’ont pas toutes été suffisantes. Ainsi, les acteurs de terrain ne disposent pas tous du même niveau d’information, ce qui fait en sorte que la stratégie n’est pas mise en oeuvre de manière uniforme dans le pays. Au-delà des problèmes de communication, certains instruments de la politique demeurent encore flous, l’interprétation et leur mise en oeuvre restent donc très variables selon les acteurs. La prise en charge du transport entre le domicile et la maternité n’a pas été considéré mais les femmes n’ont plus à avancer l’argent en cas de transfert pour bénéficier d’une césarienne à l’hôpital du district. Le remboursement des coûts de fonctionnement des ambulances entre les niveaux de la pyramide sanitaire n’a pas été clairement précisé. Au Burkina Faso, le personnel de santé a droit à des primes (dites ristournes) qui correspondent à 20% de la tarification des actes. L’arrivée de la subvention des SONU a provoqué concernant ces ristournes certaines interprétations faute d’une bonne planification. Faute de critères d’indigence aucune prise en charge systématique des indigentes n’a encore été mise en place et la plupart des agents ne sont pas au courant de l’existence de cette prise en charge. De nombreuses stratégies d’adaptation des acteurs ont été relevées dans la mise en oeuvre de la politique compte tenu du fait que certains instruments n’étaient pas tous clairement précisés. Ces stratégies ont parfois été favorables à l’accès aux soins et à une mise en oeuvre plus efficace : centraliser le transport des urgences au niveau de l’hôpital, arrêter le remboursement au coût forfaitaire pour passer au coût réel compte tenu d’une sur-estimation du forfait au départ pour les accouchements, intégrer la subvention dans des systèmes de partage des coûts pré-existants pour réduire voire supprimer le paiement direct. D’autres stratégies ont été néfastes à la mise en oeuvre : s’accorder 20% de ristournes sur le montant total de la subvention, intégrer la subvention dans le budget global de l’hôpital, facturer des actes aux parturientes avant l’accouchement sous prétexte que la travail n’a pas commencé. L’ensemble de la stratégie est piloté par une petite équipe de 5 personnes ne disposant pas de tous les moyens nécessaires pour le suivi et l’analyse de la politique. Aucune étude de base (baseline) n’a été réalisée avant la mise en oeuvre de la stratégie. Le montant total prévu pour les évaluations est de 0,02 % de l’ensemble du plan de mise en oeuvre et 0,07 % du montant de la subvention. Les outils de suivi n’ont pas été mis en place rapidement et les tâches administratives imposées au personnel sont lourdes. Le personnel de santé et les femmes semblent tous percevoir très positivement la mise en place de cette nouvelle politique. Il n’existe pas de système d’information rapidement exploitable pour évaluer les effets à court terme de la politique. Il n’est pas pour le moment possible de vérifier si le nombre de femmes référées des centres de santé aux hôpitaux a augmenté. En ce qui concerne le nombre d’accouchements, il semble que la subvention ait eu un effet positif dans les districts (avec des exceptions) où les taux d’accouchements étaient très faibles. Dans les autres, la mesure n’a pas été un incitatif suffisamment fort pour les femmes qui ne venaient pas avant, puisqu’elles doivent toujours payer 900 F. Le nombre de césariennes réalisé dans les hôpitaux de district semble avoir augmenté, sans qu’il soit possible d’affirmer que ce changement résulte de cette politique. Le gouvernement du Burkina Faso s’est doté d’une politique nationale ambitieuse en faveur de l’accès aux soins obstétricaux dans la perspective d’une réduction de la mortalité maternelle. Il s’agit assurément d’une décision politique très forte et remarquable pour la région ouestafricaine. Cette politique dispose donc de très nombreuses forces : un leadership national, un budget endogène approuvé par le Parlement, une appropriation évidente de la part des agents de santé, une perception positive de la part des ménages. Face à cette volonté politique importante, on reste surpris sur le peu d’engouements et d’appuis internationaux dont ont bénéficié les protagonistes nationaux. Alors que les partenaires techniques et financiers souhaitent aider les pays africains à atteindre les Objectifs du Millénaire pour le Développement, rares ont été les partenaires à soutenir cette politique juste et pertinente. Les plans de mise en oeuvre et de communication n’ont pas trouvé de financements et les expertises techniques nécessaires à certains moments cruciaux ne semblent pas toujours avoir été présentes. Cet engagement national en faveur de l’accès aux SONU mérite assurément un appui international plus sérieux. L’une des grandes constatations est la capacité des acteurs à s’adapter aux décisions qui sont parfois floues mais sans forcément les contrecarrer. Autrement dit, malgré un système administratif relativement strict, il demeure des marges de manoeuvre que les agents de santé en particulier ont su exploiter, la plupart du temps (mais pas toujours) au profit de la mise en place de la stratégie. On peut cependant s’interroger sur les gagnants réels de la politique. L’absence de suppression du paiement et le fait que les agents aient tout intérêts à réaliser plus d’actes pourrait laisser croire que l’augmentation du nombre d’accouchements dans certains districts résulte d’un effet sur l’offre et non sur la demande. Cela étant dit, il reste encore un certain nombre d’éléments à améliorer et préciser pour que cette politique soit des plus efficaces. Nous souhaitons maintenant faire quelques suggestions (voir les détails dans la conclusion du rapport) qu’il serait certainement intéressant de discuter avec les autorités nationales.

1. Mobiliser les partenaires au développement pour rendre accessibles en langue française les données probantes disponibles encore uniquement en anglais concernant les politiques de suppression/subvention du paiement en Afrique et les systèmes de gestion fondé sur le paiement aux extrants (output-based payment).

2. Renforcer la cellule technique de la DSF qui suit la stratégie de subvention des SONU

3. Rembourser les accouchements dans les CSPS sur la base d’un montant forfaire de 3.000 F CFA (estimation haute) en maintenant les ristournes de 20% pour le personnel sur les prix des actes.

4. Supprimer totalement le forfait (20%) demandé aux femmes.

5. Demander aux partenaires de compléter cette politique par une amélioration de l’offre des services, notamment la prise en charge du transport (y compris depuis le domicile)

6. Mettre en place un système de gestion fondé sur le paiement aux extrants (output-based payment) et non pas un système comptable centré sur les intrants (input accountability)

7. Organiser un système de suivi et d’évaluation systématique afin de mieux vérifier les effets individuels et populationnels

8. En l’absence d’une suppression totale du paiement de la part des femmes, organiser une campagne d’information sur la prise en charge gratuite des indigents et étudier le caractère transférable des conclusions des recherches sur les indigents et les critères d’identification réalisées dans le district de Ouargaye.

Le rapport complet à télécharger:

Ridde, V., & Bicaba, A. (2009). Revue des politiques d’exemption/subvention du paiement au Burkina Faso: la stratégie de subvention des soins obstétricaux et néonataux d’urgence. Institut de Médecine Tropicale d’Anvers, Belgique (Bruno Meessen) pour l’UNICEF. Download

Journal RESOLIS num.3 – Santé et pauvreté dans les pays du sud

Le troisième numéro du Journal RESOLIS, intitulé “Santé et pauvreté dans les Pays du Sud” apporte des éléments de réflexion sur l’accès à la santé dans les pays pauvres.

Un premier chapitre est consacré à l’épidémie Ebola qui frappe l’Afrique de l’Ouest depuis décembre 2013. Michel Brugière (membre de RESOLIS, ancien directeur de Médecins du Monde) nous explique pourquoi cette nouvelle poussée épidémique a pris beaucoup plus d’ampleur que les précédentes, alors que la maladie au virus Ebola est connue depuis 1976 et que nous savons comment la contenir. Dans leur article, Sophia Hafner (scientifique à l’Université de Copenhague) et David Ojcius (rédacteur en chef de RESOLIS, professeur en immunologie et microbiologie à l’Université de Californie, Merced) analysent les conséquences d’Ebola sur les économies d’Afrique Occidentale. Tous trois partagent nous invitent à tirer des leçons de ces événements tragiques, notamment en termes de prévention et de solidarité.

Des actions de solidarité sont mises en œuvre depuis des années sur le terrain, et permettent d’améliorer l’accès à la santé des populations dans les pays pauvres. Les huit témoignages regroupés dans ce numéro spécial en attestent. Ces initiatives peuvent être des sources d’apprentissage précieuses.

Un article de Valéry Ridde, “Gratuité des soins de santé pour les groupes vulnérables au Burkina Faso”, est par ailleurs publié en page 28. Plusieurs de ses travaux sont également cité dans d’autres articles du journal.

Gratuité des soins de santé pour les groupes vulnérables au Burkina Faso

Résumé:En 2008, l’ONG HELP et la Direction régionale de la santé au Burkina Faso ont mis en place une expérimentation d’exemption du paiement des soins de santé pour les enfants de moins de 5 ans, les femmes enceintes ou allaitantes et les indigents. L’analyse scientifique menée par des chercheurs indépendants permet d’en mesurer les résultats.

Téléchargement:

Ojcius, D., Hafner, S., Heinmüller, R., Letourmy, A., Desplats, D., Brugière, M., de Muylder, R., Ridde, V., Barro, M., & Emmanuel Demes, J.-A. (2015). Santé et pauvreté dans les pays du sud. resolis, 3, 28.